Malgré les épreuves, Lukasz Nowak devient maître international
A cause de son handicap, le polonais Lukasz Nowak ne jouit pas d'une grande liberté de mouvement. Mais sur l'échiquier, il se meut avec une élégance rare. Et le mois dernier, ce remarquable jeune homme de 25 ans a rempli toutes les conditions pour prétendre au titre de maître international.
Quelques mois après sa naissance, les médecins diagnostiquent chez Lukasz une amyotrophie spinale (SMA), une maladie génétique neuromusculaire empêchant le développement normal des muscles. A ce jour, il est incapable de déplacer la moindre partie de son corps, et doit être aidé pour toutes les tâches du quotidien.
Il apprend à jouer aux échecs avec son grand-père à l'âge de sept ans. 18 ans plus tard, il a atteint un niveau dont peu peuvent rêver. Sur la liste FIDE de juillet, et après deux années de progression continue, Nowak présente un Elo à 2408.
"Etre un joueur d'échecs handicapé, ce n'est pas facile, mais c'est la vie. Je dois toujours me rendre sur les tournois accompagné et trouver un hébergement avec un accès PMR, ce qui est généralement assez cher. Mon père vient avec moi sur la plupart des tournois, mais récemment, il a eu du mal à suivre le rythme à cause du travail. J'ai donc du faire appel à un assistant."
"Heureusement, je peux utiliser un ordinateur portable seul, ce qui me donne un peu d'indépendance. En partie, je dis les coups à mon assistant, et il les joue pour moi sur l'échiquier, presse la pendule, et les note sur la feuille."
Après avoir réalisé sa première norme de MI en 2016, il a fallu cinq ans à Lukasz pour réaliser sa seconde, puis encore deux pour réaliser la dernière, en juin 2023 à l'occasion de la 37ème Coupe Voivoda, à Legnica (Pologne). Il faut dire qu'en travaillant les échecs cinq heures par jour, le travail finit par payer. D'autant que le jeune homme bénéfice des conseils du GMI Bartosz Socko, une légende des échecs polonais.
"Obtenir le titre de MI est un grand soulagement. J'ai réalisé ma première norme il y a sept ans, donc je sais que je pouvais y arriver, mais je n'arrivais pas à garder mon niveau de performance sur le long terme."
Nowak termine ce tournoi toutes rondes à 10 joueurs en seconde place avec 5,5 points, derrière son compatriote Jan Klimkowski (FM) avec 6,5.
"J'ai mal commencé le tournoi. Deux sur cinq, ce n'est clairement pas le résultat dont je rêvais. Il fallait absolument que je me mette à gagner des parties, mais je n'ai pas paniqué et je suis arrivé très détendu à la sixième ronde." Retrouvez ci-dessous la partie analysée par ses soins pour Chess.com !
"Les trois derniers parties furent moins simples, mais j'ai réussi à marquer 2,5 points et à réaliser la norme."
Quand on l'interroge sur la clef de ses récents progrès, Lukasz répond :
"A mon avis, le plus important lorsque l'on veut progresser aux échecs, c'est d'avoir une routine quotidienne. Par exemple, s'entraîner une heure tous les jours est beaucoup plus efficace que de s'entrainer sept heures en une journée et de ne rien faire les six autres jours de la semaine. Cette régularité au travail m'a aidé à considérablement améliorer mon niveau."
Lukasz souhaite avant tout être considéré comme une personne comme les autres, et au sein de la communauté échiquéenne, il a trouvé cette reconnaissance. "Tout le monde est très gentil et m'aide beaucoup."
Le jeune polonais se sent désormais prêt à passer au challenge supérieur : celui de la chasse au titre de GMI. Mais à cause de son handicap, cette entreprise pourrait s'avérer très couteuse, et il est à la recherche d'un sponsor pour le soutenir dans l'aventure.
"Les échecs, c'est ma passion, mais c'est aussi un mode de vie. J'y ai trouvé des buts à accomplir. Devant l'échiquier, j'oublie mon handicap et je participe, comme tout le monde. J'adore les tournois ! Je ne pourrais pas imaginer ma vie sans compétition..."