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Ding renait de ses cendres et égalise !
Ding Liren a totalement relancé le suspense en répliquant du tac au tac ! Photo : Eng Chin An/FIDE.

Ding renait de ses cendres et égalise !

Colin_McGourty
| 0 | Couverture d’événements d’échecs

Tel le phœnix d'Astana, Ding Liren a de nouveau déployé ses ailes pour survoler la douzième partie du Championnat du Monde FIDE 2024 et revenir à 6-6. Dos au mur et fort des pièces blanches, le GM chinois n'a pas hésité à lâcher ses coups pour surclasser totalement en milieu de jeu Gukesh Dommaraju, vite retombé sur terre après l'euphorie de la veille. Le suspense à son paroxysme, une journée de repos permettra à nos deux gladiateurs de souffler avant la dernière ligne droite qui s'annonce riche en émotions !

La 13ème partie se déroulera mercredi 11 décembre à partir de 10:00, heure de Paris et verra Gukesh conduire les blancs.

Score du Match

Nom Elo 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 Score
  Ding Liren 2728 1 ½ 0 ½ ½ ½ ½ ½ ½ ½ 0 1 . . 6
  Gukesh Dommaraju 2783 0 ½ 1 ½ ½ ½ ½ ½ ½ ½ 1 0 . . 6
Comment suivre le Championnat du Monde FIDE 2024 ?
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La retransmission avec Kévin Bordi et le GM Fabien Libiszewski.

 

Tout est à refaire pour Gukesh après cette défaite implacable ! Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

L'analyse du GM Rafael Leitao

Ding, le roi du come-back

Anish Giri s'est fait le porte-parole de tous les observateurs quant à la métamorphose de Ding entre hier et aujourd'hui : "Je ne comprends pas ce qui se passe avec Ding... C'est un tel mystère pour moi. Hier, il avait l'air totalement brisé et maintenant il joue une partie absolument incroyable du début à la fin !".

Il avait l'air totalement brisé et maintenant il joue une partie absolument incroyable du début à la fin !

— Anish Giri à propos de Ding

Le champion du monde s'est en effet rappelé à ses bonnes habitudes de son précédant match face à Ian Nepomniachtchi où il était revenu au score pas moins de trois fois ! Alors quel est son secret ? Voici quelques conseils tirés de sa conférence de presse d'après-partie :

1. Comprendre ce qui n'a pas fonctionné : il aurait été facile pour Ding de sombrer dans le désespoir après sa défaite, au lieu de quoi, il a réussi à faire une analyse objective de la partie." Si j'avais joué e6 au lieu de g6 hier, j'aurais également pu faire une très bonne partie", a-t-il fait remarquer, avant de conclure : “J'ai juste passé trop peu de temps sur les moments critiques et j'ai gâché une très bonne position”.  

2. Passez une bonne nuit de sommeil : Traditionnellement, les joueurs d'échecs nous disent qu'il est impossible de bien dormir après avoir perdu une partie importante, mais Ding y est parvenu. Il a déclaré : "La nuit dernière, j'ai bien dormi, je me suis couché plus tôt et cela m'a donné beaucoup d'énergie".   

3. Changer quelque chose (n'importe quoi) : S'inspirant peut-être de Nepo lors de leur duel épique, Ding a fait quelque chose auquel personne n'aurait pensé : changer de coupe de cheveux ! "D'abord, j'ai un peu changé mon apparence, j'ai fait quelque chose avec mes cheveux", a-t-il glissé lors de la conférence de presse. 

Une nouvelle coupe porte-bonheur ?. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

4. Boire du café : Pour beaucoup d'entre nous, boire du café fait partie intégrante de l'expérience d'un match de Championnat du Monde, mais pas pour Ding... jusqu'à présent ! Il a raconté : "J'ai pris une tasse de café avant la partie, ce qui m'a aidé à me sentir beaucoup plus tonique", et il a également régulièrement grignoté dans le salon des joueurs pour maintenir son niveau d'énergie pendant la partie. Comment aime-t-il son café ? (oui, les conférences de presse permettent d'entrer dans les moindres détails) : "une petite tasse d'expresso".

5. Avoir le soutien de ses amis et de sa famille : Interrogé sur le rôle de son secondant et de sa mère, Ding a répondu : "[Richard] Rapport m'a envoyé un fichier intitulé "Strike Back !" et c'est arrivé ! Ma mère m'a donné confiance, elle m'a dit que j'avais réussi la dernière fois, que je pouvais recommencer !".

6. Avoir un nombre porte-bonheur : Le 12 porte visiblement chance à Ding puisqu'il a pris la bonne habitude de gagner lors de cette ronde dans les tournois majeurs.

Il a toutefois précisé que son nombre préféré était le 17 puisqu'il est le "17ème champion du monde de l'histoire !".  

Une ouverture tranquille

Ding avait donc mis toutes les chance de son côté mais seule la vérité de l'échiquier avait le pouvoir de valider ses bonnes intentions. Peter Leko a correctement prédit l'Anglaise avec 1.c4, mais s'attendait à ce que Gukesh rejoue 1...e5 au lieu de quoi le challenger a préféré varier avec 1...e6.

Quand Gukesh a joué 8...e5, après avoir dépensé seulement trois minutes à la pendule contre 20 pour Ding, on pouvait supposer que le clan indien avait trouvé un moyen de neutraliser la préparation adverse.

Ding a reconnu : "J'ai été pris par surprise par mon adversaire dans l'ouverture et j'ai dû trouver des idées pour lui poser des problèmes“, tandis que Gukesh s'est dit ”au courant de la position“ et ”assez à l'aise", même s'il ne se souvenait pas de tous les détails.

Les nuages se sont progressivement rassemblaient au-dessus de la position noire jusqu'au premier nouveau coup, 10...h6 !?, décrit par Ding comme "trop lent" bien que la suggestion de la machine 10...Fe6! sans l'approche prophylactique privilégiée par le challenger était difficile à trouver.

Ding a alors enchainé une séquence très précise mettant les noirs dans l'embarras, comme expliqué par Giri : "Les pièces des noirs ont déjà trouvé leurs meilleures cases et il est difficile pour eux d'améliorer leur position alors que les blancs disposent de nombreux moyens". 

Ding montre les crocs

Ding 2.0 était devant l'échiquier pour cette douzième ronde. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Dès le 14ème coup, nos commentateurs étaient conquis par l'approche du champion du monde, Léko résumant : "J'ai l'impression que tous les coups de Ding sont liés les uns aux autres, qu'ils ont une âme profonde... J'ai le sentiment que Ding joue ici avec brio !".

Giri, quant à lui, après le puissant bond du cavalier en b5 au 15ème coup, a souligné que le fait d'être dans une situation de victoire (presque) obligatoire pouvait vraiment aider un joueur qui doute de lui-même, comme il l'avait personnellement expérimenté contre nul autre que Magnus Carlsen.

Ding lui-même confirmera cette théorie plus tard, en montrant comment il avait évité une ligne qui aurait pu conduire à une triple répétition et en affirmant son état d'esprit : "Je n'avais aucun moyen de battre en retraite - je devais pousser pour la victoire !".

Gukesh a commencé à sentir le danger après 17.Dd2!, un coup subtil approuvé par l'ordinateur, admettant : "Je n'étais vraiment pas sûr de ce qu'il fallait faire". Ding, quant à lui, avait un plan très clair.

Gukesh a expliqué que sa réplique 17...Fg6?! "était juste une gaffe", puisqu'il n'avait pas vu qu'après 18.d4, son intention originale 18...exd4? se heurtait à 19.Ff4!. Dans les coups suivants, le prodige indien a désespérément essayé de créer du contre-jeu à l'aile dame pendant que son bourreau s'appliquait à lui maintenir la tête sous l'eau.

Le champion du monde libéré, délivré !

Gukesh ne pouvait plus que repousser l'inéluctable. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Ding a réalisé qu'il commençait à toucher la victoire du doigt après le coup 23...Fg5?! de son rival.  

Le champion du monde a confessé qu'il avait failli s'emmêler les pinceaux au moment de faire l'écart : "Ma première intention était de jouer h4, mais c'est un très mauvais coup !".

Après 24.h4?, les mouches auraient clairement changé d'âne mais Ding avait retenu la cruelle leçon de la veille et son surplus d'énergie lui a permis de rester dans le droit chemin : "Ici, je pense que j'ai pris ma dernière longue réflexion importante car que si j'avais joué h4, j'aurais gâché cette très bonne position". 

Ding, radieux, après sa master class du jour. Photo : Eng Chin An/FIDE.

Après avoir passé dépensé 5 de ses 24 dernières minutes, il a trouvé 23.Cf4! et compris que sa position était "bien, bien meilleure".  Giri s'est alors demandé à haute voix comment Ding avait pu paraître si démoralisé la veille et délivrer "une partie aussi incroyable aujourd'hui".

Le facétieux GM néerlandais restait inquiet quant à la capacité du champion du monde à maintenir le cap jusqu'au bout mais ce dernier a tenu bon : "J'ai mis la pression sur mon adversaire pendant toute la partie, je n'ai pas craqué comme lors de la dernière partie !".

J'ai mis la pression sur mon adversaire pendant toute la partie, je n'ai pas craqué comme lors de la dernière partie !

— Ding Liren

Un léger flottement a envahi ses supporters quand Ding n'a pas saisi l'opportunité de gagner gratuitement une qualité avec 26.Ca7!.

Néanmoins, sa perforation centrale 26.d5, suivi de 27.d6 s'avérait encore plus puissante selon la machine même si moins évidente d'un point de vue humain et pratique. 

Ding a reconnu amusé durant la conférence de presse avoir simplement "raté Ca7", dissipant le mystère.  

On pourrait également dire qu'il a "raté" un sacrifice de dame quelques coups plus tard, mais le champion du monde jouissait d'un avantage écrasant et n'avait aucune raison de prendre des risques inutiles : "J'avais deux pions de plus et les compensations", s'est-t-il justifié. Il n'a en revanche pas laissé passer l'occasion de conclure par un élégant sacrifice de tour pour assurer la promotion de son pion d.

Quel retournement de situation invraisemblable en l'espace de 24 heures !

La poignée de main finale entre les 2 hommes. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

"C'est peut-être la meilleure partie que j'ai jouée ces derniers temps", s'est réjoui Ding qui a choisi le meilleur des moments pour retrouver de sa superbe.

À quoi s'attendre désormais ? 

Les rôles se sont inversés, Gukesh quittant cette fois la conférence de presse le premier. Photo : Eng Chin An/FIDE.

Le score est donc de 6-6 et, soudain, la balle revient dans le camp de Gukesh, qui s'est adapté avec son calme habituelle à la situation :

Il est évident que cette partie est un peu décevante. Heureusement, j'ai un jour de repos demain pour récupérer, mais c'est bien de savoir que le score est toujours à égalité et que cette partie n'entame pas trop sérieusement mes chances, c'est encore un match équilibré. Je vais simplement essayer de faire de bonnes parties ! 

Cette partie n'entame pas trop sérieusement mes chances.

— Gukesh Dommaraju

Nous sommes désormais certains d'avoir droit à nos quatorze parties classiques avec la perspective des départages en rapide qui se rapproche.

Lors de la conférence de presse, Ding s'est montré philosophe s'il venait à perdre sa couronne : "Si je ne gagnais pas aujourd'hui ou lors des deux dernières parties, j'allais tout simplement perdre mon titre, ce que j'acceptais". Comme nous l'avons vu, le champion du monde est encore bien loin d'avoir abdiqué !

Nous vous donnons rendez-vous mercredi pour l'avant-dernière partie, où Gukesh tentera certainement de reprendre les devants avec les pièces blanches.


Le récap vidéo de Kév et Fab


Le Championnat du Monde FIDE 2024 se déroule à Singapour et déterminera le prochain champion du monde. Le challenger indien Gukesh Dommaraju, 18 ans, affronte le tenant du titre chinois Ding Liren dans un match en 14 parties classiques, le premier à atteindre 7,5 points étant déclaré vainqueur. La cadence est de 120 minutes pour les 40 premiers coups, suivies d'un ajout de 30 minutes avec un incrément de 30 secondes par coup à partir du 41ème coup. La dotation s'élève à 2 500 000 dollars, dont 200 000 dollars pour le vainqueur et le reste distribué en parts égales. En cas d'égalité 7-7, des départages auront lieu, commençant par un mini-match de quatre parties rapides en 15+10.


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    Colin McGourty

    Colin McGourty led news at Chess24 from its launch until it merged with Chess.com a decade later. An amateur player, he got into chess writing when he set up the website Chess in Translation after previously studying Slavic languages and literature in St. Andrews, Odesa, Oxford, and Krakow.

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